vendredi 28 janvier 2011

Pognés en Patagonie....y'a pire que ça dans la vie !!!!!!!

Quelque part en décembre, j’ai reçu une bonne nouvelle de mes bons amis Florimond et Alexandra. Leur billet d’avion pour Santiago était acheté, ils venaient me rejoindre le 9 janvier pour visiter avec moi la Patagonie. Flo et Alex sont de bons « partners de rando » avec qui je suis allée notamment, en juin 2010, pour 6 jours de randonnée en Gaspésie.

DÉFINITION DE LA PATAGONIE
La Patagonie s'étend principalement en Argentine, sur 1 140 532 km2, et tout le long de la côte Pacifique du Chili sur 256 093 km2. Ces deux pays, séparés par la cordillère des Andes, abritent des paysages contrastés de montagnes, de glaciers, de pampa, de forêts subpolaires, de littoraux, d'îles et d'archipels. Habitées depuis plus de 10 000 ans par les Sud-Amérindiens tels les Mapuches, les Tehuelches ou les Selknams, ces terres furent décrites pour la première fois par l'italien Antonio Pigafetta dans son récit du premier tour du monde du navigateur portugais Fernand de Magellan publié en 1525. Après une colonisation lente et difficile, la plupart des autochtones disparurent, remplacés par une population métissée qu'on peut qualifier de « sudaméricano-européenne ». Avec une densité de 3,8 habitants au km2 (3 habitants au km2 en Sibérie, 0,46 habitant en Alaska), la Patagonie est une des régions les moins peuplées au monde. Ses terres sont exploitées pour l'élevage de bétail en d'immenses fermes appelées estancias ou convoitées pour leurs ressources naturelles importantes. Elle représente des intérêts écologiques et géonomiques importants qui suscitent des convoitises.

Comme première destination « patagonienne », nous avons opté pour le réputé Parc Torres del Paine, dans le sud du sud du Chili. Voici deux liens intéressants. Le premier est une carte détaillée du parc alors que le second est le résultat produit par le GPS d'une personne qui a fait sensiblement le même circuit que nous.
http://fsexpeditions.com/booking_hiker/img/big_map.jpg

http://www.everytrail.com/view_trip.php?trip_id=126523

Pendant notre vol en avion qui nous a amené de Santiago à Puerto Natales, porte d’entrée du parc, nous avons ri comme des p’tis fous. La joie de nous retrouver était au rendez-vous, il n’y avait pas à dire. Lors de notre escale à Punta Arenas, nous avons pu constater comme les vents sont fort présents en Patagonie, nous en avions déjà été avisés. Un camion circulait sur la piste d’atterrissage et le vent faisait en sorte que le drapeau accroché derrière, allait dans le même sens que le camion, ce qui n’est pas « normal » !! À Puerto Natales, nous nous sommes empressés de faire les achats pour notre expédition (gaz blanc, nourriture, etc…). Il n’y avait pourtant pas si longtemps que j’avais fait ça à Mendoza pour l’expédition Pat-Nat à l’Aconcagua !!! Comme dernière bouffe parmi la civilisation, nous avons choisi un resto argentin où l’on sert de bonnes grillades. Déjà le lendemain matin, nous nous rendions à Laguna Amargua pour procéder à notre enregistrement pour le parc. Ne restait plus qu’un autre mini bus et nous étions rendus au Refugio Las Torres où nous allions passer notre première nuit. Rapidement, nous décidons de partir pour ce qui nous apparaissait être une « rando du dimanche ». Sans trop savoir pourquoi, je n’avais pas d’énergie cette journée là, je trainais de la patte derrière Flo et Alex qui m’ont gentiment rassurés en me disant qu’ils étaient venus me voir en Patagonie, ils allaient donc s’adapter à mon rythme. Une fois un niveau d’énergie plus raisonnable atteint, on s’est mis à courir dans la trail, à dépasser chaque humain qui s’y trouvait ! Le seul litre d’eau et la seule barre tendre à manger que j’avais ont vite été insuffisants car finalement, ce n’était pas une « rando du dimanche ». Au total, nous avions 18 kilomètres à parcourir et 800 mètres de dénivelés à grimper. Aurais-je dû être sage et rebrousser mon chemin dès le départ ??! No way, le spectacle donné par les 3 tours au bout du sentier valait largement le déplacement, énergie ou pas !!! Et les « pisco sour » au retour étaient une belle récompense aussi ;-) Sur la route, le seul animal que nous avons rencontré est un petit renard, appelé zorro en espagnol ! En soirée, Flo a dû faire bien des efforts pour me tenir éveillée, le vidéo qui a été fait à mon insu est tout simplement tordant, je vous montrerai ça à mon retour !!

Première journée correcte : du Refugio Las Torres jusqu’au camping Seron, avec un court 13 kilomètres de rando. Les vents sont omniprésents et la fine pluie aussi mais elle n’est pas trop dérangeante. Les décors dans lesquels nous marchons sont différents. Au tout début, nous pourrions dire que nous croisons un verger alors qu’un peu plus loin, nous passons dans un champ de « je t'aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout »…. les belles marguerites blanches et jaunes. La majeure partie du sentier suit une petite rivière. Enfin, après avoir traversé une grande plaine, nous atteignons le camping Seron et faisons la super découverte ….Flo a perdu les piquets de la tente, nous allons devoir trouver une solution ! Par chance, ce soir là, les garde-parc nous en ont prêté! Petite soirée sous la tente car il pleut abondamment. La vieille tente Lafuma gentiment prêtée par Guy passe le test, l’eau ne nous atteint pas….fiou ! Alex et moi « feelons » tannantes en retirant la serviette du sac que Flo a préparé pour aller prendre sa douche. Nous avons ri pendant tout le temps où il a été absent, jusqu’au moment il est revenu dans la tente en blasphémant !
Deuxième matin, le ciel est bleu et clair, la pluie a cessé pendant la nuit, a notre grand bonheur. Notre plan de match est de nous rendre au camping El Paso, soit 22 kms plus loin. Mais encore une fois, la fatigue se fait sentir de mon côté. Mon pas est lent, du moins, beaucoup plus que celui de mes 2 amis « a grandes jambes ». J’ai parfois l’impression de devoir courir dans le sentier pour arriver a les suivre. De plus, mes vieilles bottes de 8 ans font souffrir mes pieds. Sur le chemin, nous croisons un couple de Gatineau qui nous apprend qu’une grève sévit dans la région de Magellan ou nous nous trouvons. Les chiliens protestent contre la hausse du prix de l’essence et cela a pour conséquence que le parc Torres del Paine est fermé. Fermé signifie pas d'entrée, ni de sortie !!! Les routes sont paralysées et même la frontière est barrée. Bon, bon, bon, nous sommes pour le moment prisonniers du parc…..quel dommage ! D’où notre expression « pognés en Patagonie, y’a pire que ça dans la vie !! ». Pour le moment, nul besoin de paniquer, il nous reste encore 4 ou 5 jours de rando à faire. Notre stratégie est donc de mettre la pédale douce et de profiter de chaque instant dans ce parc qui a tant a offrir. Arrivés au camping Dickson, Alexandra adresse un seul mot au garde-parc : cerveza ??! Il répond positivement, Alexandra est toute contente !!! Nous arrêtons pour manger notre diner, évidemment accompagné d’une cerveza Austral, la bière de la Patagonie ! Finalement, d’un commun accord, nous décidons d’installer notre campement dans ce site que je qualifie de très enchanteur. Nous sommes a proximité d’un lac formé par les eaux turquoises coulants du glacier Dickson. La fin de la journée est passée a « chiler » près de la tente que nous avons installée non loin du lac. Nous effectuons quelques aller-retour au refugio pour aller récupérer « tres cervezas ». La dernière fois que je suis allée, le gars était surpris de me voir encore, il m’a dit « tres mas » ??!!! Voila, notre réputation était faite !!
Troisième matin, nous voyons a nouveau les deux hollandais qui semblent suivre le même itinéraire que nous. Wouter et Yuris sont deux frères de 44 et 45 ans qui ont tous deux laissés leur famille de côté pour quelques semaines, le temps de venir parcourir quelques kilomètres de terre patagonienne. Bien que nous savons que le camping Los Perros n’est plus très loin, nous sommes tentés d’arrêter pour le diner non loin du tout premier glacier qu’il nous est donné de rencontrer sur notre route. C’est tellement impressionnant de l’entendre craquer. Tous les trois, nous arrêtions de mâcher pour pouvoir observer le glacier et trouver quelle portion allait s’effondrer. Diner mémorable ! Encore une fois, nous avions pour objectif de nous rendre un peu plus loin mais la courte pause « bière » que nous avons prise au camping Los Perros et l’entretien que nous avons eu avec le garde-parc, nous ont incité a y rester pour la nuit. Nous n’avons pas avantage a avaler une grande quantité de kilomètres a chaque jour puisque de toute facon, la grève dure encore et qu’il nous est impossible de sortir du parc. Autant mieux en profiter !! Le garde-parc nous a suggéré d’aller a la base du glacier Puma, Yuris accepte de venir avec nous. Le sentier n’est pas indiqué sur nos cartes mais il nous rassure en nous disant que la trail est bien identifiée et qu’il est impossible que l’on se perde. Au bout d’une heure, après avoir suivi la jolie rivière, nous arrivons a la base du glacier Puma formé de quelques cavernes que nous explorons, malgré le danger. Nous étions tous les 4 comme des enfants, très épatés devant cette immense brute de glace et tentés d’explorer chaque racoin, chaque trou ! A l’unanimité, nous pouvons dire que ce moment fut un « highlight » de notre voyage et pourtant, ce n’était même pas indiqué sur la carte !!
Prendre une douche a Torres del Paine n’est pas toujours une partie de plaisir, surtout quand la source d’eau provient du glacier. Ais-je besoin de vous dire que c’est glacial comme douche ?!!! En plus, la cabine de douche est a l’extérieur et la porte n’est qu’un mince rideau qui a tout coup, risque de voler au vent. Il n’y a pas de crochets ni de tablette dans la minuscule cabine, il faut donc laisser les vêtements sur la marche extérieure et risquer de voir ses sous-vêtements partir au vent. Si je le dis, c’est que c’est arrivé mais par chance…..pas à moi, mais la veille a un suisse qui a du courir nu fesse sur le terrain de camping pour récupérer ses bobettes !!!!!!
Lendemain, montée au Paso John Garner qui est le point le plus haut de notre rando, avec ses 1 229 mètres. Durée de la montée : 2h30. C’est censé être la journée la plus exposée au froid et au vent mais pourtant, nous avons eu une journée exceptionnelle, presque sans vent et pas très froide. Nous avons attaqué une longue descente le long du glacier Grey avant d'atteindre les passages dans des chutes encavées ou nous devions emprunter des escaliers accrochés a la paroi. Il est peu fréquent que nous ayons a marcher le long d’un glacier. La vue que nous avions de la haut était absolument fantastique, avec les montagnes entourant le glacier….wooowwwwwwwww ! On se sent infiniment petit dans un univers aussi immense. C’était également notre journée la plus longue, 22 kms au total. Le départ a été donné vers 10h30 (a chaque jour, le départ se faisait de plus en plus tard) et nous sommes arrivés au Refugio Grey a 18h30, tout près du lac formé par la fonte du glacier. Chaque soir, lorsque nous arrivons dans les refuges ou les campings, tous les trois en chœur chantons : « Y'a tu d'la bière icitte, y'a tu d'la bière icitte, si y'a pas d'bière icitte, on sacre notre camp d'icitte !!! ». Nous décidons de nous payer un peu de confort et de dormir dans le refugio. Flo et Alex commencent à lever le nez sur les sachets de bouffe déshydratée et à être affamés devant les menus très chers proposés dans les refugios. Je ne me laisse pas tenter, préférant liquider les nombreux sachets que je traine depuis le début dans mon sac a dos. A chaque endroit où nous cuisinons nos sachets de nourriture lyophilisée, ils suscitent la curiosité des gens qui n’ont pas accès à ce luxe en randonnée et veulent donc comprendre le principe !!
Cinquième jour, nous parcourons la portion du sentier « Grey – Italiano », qui est une marche tout de même assez facile. Nous passons par le refugio Paine Grande ou nous apprenons que la grève n'est toujours pas terminée, que près de 1 000 personnes sont coincées à la sortie du parc et presqu'autant, sinon plus, à Puerto Natales, village d'entrée du Parc Torres del Paine. Alors pourquoi se presser ?! Il y a deux choix de parcours dans le parc Torres del Paine, le O (circuit complet que nous faisons) ou le W qui est la base du circuit complet et ne représente que quelques jours de rando. La majorité des gens parcourent le W et nous nous trouvons au début de cette portion du parcours. Habituellement, n’eut été de la grève, l’achalandage aurait été monstre puisque nous sommes en plein dans le « high season ». Cependant, la grève a eu pour conséquence de vider les sentiers du parc. Le parc Torres del Paine est désert (à l’exception de la sortie ou sont coincés plusieurs personnes), nous ne croisons personne dans les sentiers, c’est une chance incroyable !! Le camping Italiano est très sommaire n'offrant ni toilette, ni provisions, ni endroit où s'abriter. 
Le lendemain, nous partons pour une courte randonnée dans la vallée des français qui passe par le campement des britanniques. Le guide Lonely Planet décrivait cette section comme immanquable, malgré le manque d’énergie dont nous étions possiblement victime. Des randonneurs nous avait également dit que cela valait la peine d’y aller. Est-ce en raison des magnifiques paysages que nous avons vu dans les jours précédents mais moi, je n’ai pas été épatée !! La seule chose qui m’a surprise, ce sont les avalanches qui survenaient à tout coup dans la montagne devant nous. Ah oui, une autre chose, nous avons vu de très près un joli petit hibou …hou hou !! Au retour au campement Italiano, nous avons fait nos bagages constitués de notre chambre a coucher, notre garde-manger, la cuisine, chacun notre garde-robe, la pharmacie, etc….. Une heure 20 minutes plus tard, nous voilà rendus au Refugio Los Cuernos habituellement bondé a ce temps-ci de l’année. Près de 150 personnes auraient dû s’y trouver.....nous étions 6, avec environ 8 membres de personnel qui n'attendaient qu'à prendre soin de nous !!
Le lendemain, comme nous n’étions qu’a une seule journée de la fin de notre parcours, que le conflit n’était pas réglé, nous avons fait le choix de « chiler » au refugio Los Cuernos qui nous offrait un magnifique décor pour jouer au scrabble tout en buvant de la bière ;-) On l’a dit : pognés en Patagonie, y’a pire que ça dans la vie !! Vers 14h, on nous a fait l’annonce que le conflit était réglé, cela signifiait que le lendemain, nous devions compléter notre tour du Parc Torres del Paine. C’est bien dommage car cette journée perdue a fait en sorte que Flo et Alex n’ont pas pu visiter un autre parc, glacier ou autre pendant leur séjour. Nous comptions aller ensemble a El Calafate et El Chalten, deux villes de la Patagonie Argentaine que je visiterai sans eux….snif snif ! Pour terminer en beauté notre séjour au Refugio Los Cuernos, nous avions demandé aux chiliens de faire chauffer le « hot tub », version patagonienne ! Nous avons été bien surpris de découvrir que le système de chauffage du « hot tub » était en fait, un poêle à bois dissimulé sous l’eau !! De quatre à cinq heures étaient requises pour faire grimper la chaleur de l’eau au-delà des 100 degrés celcius mais vous constaterez à la vue des photos, que ça valait l’attente !!! Ici, le soleil se couche très tard, soit dans les environs de 10h30. Nous avons ainsi terminé notre soirée dans le « hot tub ».
Dernière journée, celle qui nous mène au point de départ d’il y a huit jours, a l’hostal Las Torres. Au total, nous avon parcouru plus de 115 kilomètres pendant la durée totale de notre déjour. C’est la dernière fois que nous croisons les deux frères hollandais qui ont agrémenté notre séjour dans le Parc Torres del Paine. Rapidement, nous reprenons contact avec le monde virtuel d’Internet avant de prendre à nouveau le bus, en direction de Puerto Natales ou nous dégustons notre dernier souper Alex, Flo et moi. Un peu a l’avance, nous célébrons l’anniversaire de Flo !! Il n’y a aucune trace du conflit dont nous avons tant entendu parler sans toutefois avoir vécu les inconvénients mais plutôt profité des avantages. Après y avoir passé 9 jours, c’est clair dans ma tête….pognés en Patagonie, y’a pire que ça dans la vie !!!
VIVA LA VIDA, Natalia xx

 PS : Les photos sont disponibles à l'adresse suivante :